Outils éducatifs
Demandez-vous :
- Comment les préjugés et la discrimination peuvent-ils empêcher l’immigration des demandeurs d’asile?
- Quelles sont les lois en place pour protéger les droits des immigrants?
Ceci s’est réellement produit
Le Komagata Maru était un navire à vapeur japonais qui a navigué du Punjab, en Inde, à Vancouver, en Colombie-Britannique en 1914, en passant par la Chine et le Japon. Lors de son arrivée au Canada, les autorités ont refusé l’entrée au pays à tous les passagers indiens qui espéraient immigrer. Une loi ordonnait que les personnes souhaitant immigrer pouvaient uniquement le faire lors d’un « voyage continu » et grâce à des billets achetés avant de quitter leur pays d’origine. En raison de ces lois d’exclusion adoptées pour interdire l’entrée uniquement aux immigrants d’origine asiatique, le navire a été forcé de retourner en Inde. Lors de l’arrivée du navire en Inde, une émeute a éclaté et a entraîné le décès d’environ 20 passagers qui avaient été pris pour des délinquants et des agitateurs politiques.
En observant les photos, en lisant les témoignages de personnes liées à l’incident, en lisant un scénario et en vous demandant si des excuses sont suffisantes, vous découvrirez l’impact des médias sur les événements historiques et examinerez certaines lois concernant l’immigration pouvant être jugées discriminatoires.
Un homme Sikh parle du et la discrimination vers les Sikhs
Artéfacts
Photos du Komagata Maru
Il existe de nombreuses photos d’archives de l’incident du Komagata Maru. Bon nombre de ces photos publiées dans les journaux nous donnent un aperçu de l’expérience vécue par les personnes concernées. Les deux photos qui suivent ont été prises respectivement à bord du navire et sur la jetée à Burrard Inlet, à Vancouver. Elles restituent l’atmosphère, projettent deux points de vue différents et traduisent les pensées et les sentiments ressenties par ces deux groupes opposés vivant ce même événement historique.
PHOTO A:
Immigrants indiens sur le Komagata Maru
Crédit : Archives de la ville de Vancouver
PHOTO B:
Vancouver, Colombie-Britannique – quai
Crédit : Bibliothèque publique de Vancouver Public
ACTION 1
Faire
Réagir aux photos
A. Formez quatre grands groupes pour examiner ces photos. Pour commencer, deux groupes peuvent étudier la photo A tandis que les deux autres groupes examinent la photo B. En groupe, partagez vos réactions à cette image en tenant compte des critères suivants. Utilisez un tableau en deux volets pour organiser vos idées.
Que voyez-vous? | À quoi pensez-vous? |
B. En groupe, reconstituez la scène prise en photo. Chaque membre du groupe doit choisir un personnage. Quelle posture prendrez-vous? Quelles expressions faciales et quels gestes utiliserez-vous?
C. Une fois que chaque groupe a terminé l’image fixe, le groupe A1 peut faire face à un groupe A1 partenaire (c.-à-d. : les deux images fixes se font face au compte de trois).
Cette activité est ensuite répétée, alors qu’un groupe forme le public de l’autre. On encourage les personnes qui regardent l’image à marcher autour de celle-ci pour l’examiner sous différents angles et pour bien observer les gestes et les expressions faciales. En utilisant du papier graphique et des marqueurs, notez ce qui vous vient à l’esprit en regardant l’image : Comment ces gens se sentaient-ils? Que pourraient-ils dire? Quels mots expriment le mieux leurs émotions?
Chaque groupe doit avoir la possibilité de présenter des images à son groupe partenaire et de remplir le tableau.
Discuter
En classe, discutez de ce qui suit :
- Qu’avez-vous appris sur l’incident du Komagata Maru en regardant la photo?
- Quelle histoire les photos racontent-elles?
- Est-ce qu’une seule photo peut dire une « vérité »?
- Pourquoi les gens présents sur la jetée avaient-ils aussi peur des immigrants en attente?
- Quelles autres photos pourriez-vous voir?
ACTION 2
Faire
L’incident du Komagata Maru : Le scénario
Sharon Pollock, dramaturge canadienne, a écrit une pièce intitulée The Komagata Maru Incident. Elle décrit des événements historiques qui invitent les lecteurs et le public à se poser des questions au sujet de l’histoire réelle et de celle décrite sur la scène. La scène suivante a lieu au début du scénario. T.S., le maître de cérémonie, qui joue plusieurs rôles, rencontre William Hopkinson, inspecteur de l’immigration.
A. Lire et réagir à l’extrait du scénario
Lisez le scénario seul, puis travaillez avec un partenaire et discutez des points suivants :
- Quels faits avez-vous appris dans cet extrait au sujet du sort des Sikhs présents sur le navire?
- Résumez les deux points de vue de ces personnages.
- Dans la pièce, le personnage de TS joue le maître de cérémonie (et d’autres rôles). Selon vous quel rôle TS joue-t-il ici? Décrivez son personnage.
- Selon vous, comment pourrait-on représenter cette scène au théâtre?
B. Interprétation du scénario
Avec un partenaire, choisissez un rôle à lire à voix haute dans le scénario. Répétez l’activité, en changeant de rôle.
Pour répéter ce scénario, les acteurs peuvent jouer leur rôle de différentes façons. Une fois que vous aurez choisi le rôle à répéter, adoptez l’une des attitudes ou émotions suivantes pour interpréter les répliques (p. ex., TS peut être calme et Hopkinson peut être en colère; les deux personnages peuvent être en colère, etc.).
- calmement
- en colère
- avec hésitation
- avec tristesse
- de façon apathique, avec désinvolture
C. Répéter le scénario
Lorsqu’un acteur répète, il explore différentes émotions pour connaître la meilleure façon de transmettre la signification des textes. Essayez différentes façons de lire ces répliques et de jouer avec votre partenaire. Discutez avec votre partenaire de la façon qui semble la plus authentique pour une représentation théâtrale (c.-à-d. : comment chaque personnage se sentirait s’il poursuivait la conversation?). Après avoir répété la scène, présentez-la à un autre groupe de partenaires et comparez les différentes interprétations.
ACTION 3
Faire
Écrire une nouvelle scène
A. Comme pour tous les conflits historiques, il peut y avoir de nombreux côtés à une histoire. Parmi les rôles suivants, choisissez-en un ou plus pour écrire une nouvelle scène comportant deux ou trois personnages. Choisissez les rôles à partir de toute combinaison des rôles suivants :
- Un agent de l’immigration
- Un Sikh qui a voyagé sur le navire
- Un Indo-Canadien qui vit en Colombie-Britannique depuis de nombreuses années
- Le premier ministre du Canada
- Un politicien qui demande qu’on leur refuse l’entrée au pays
- Autre?
B. En équipe de deux ou en petit groupe, préparez une nouvelle scène visant à transmettre d’autres points de vue en lien avec cet événement. Pour cette scène, réfléchissez aux éléments suivants :
- Quels personnages pourraient faire partie de la scène?
- Quel est l’environnement?
- De quelle façon le conflit particulier sera-t-il abordé?
- Quels renseignements et sentiments votre scène représentera-t-elle au sujet de l’injustice faite aux immigrants?
C. Une fois que vous aurez terminé, répétez la scène avec votre groupe pour la présenter aux autres élèves qui ont travaillé sur une autre scène.
Remarque : Le scénario complet de The Komagata Maru Incident de Sharon Pollock est disponible auprès de Playwrights Canada Press.
The Komagata Maru Incident: A script by Sharon Pollock
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T. S.: Master of Ceremonies William Hopkinson: Department of Immigration Inspector |
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T.S. | The Komagata Maru’s in port with three hundred and seventy-six potential immigrants. |
Hopkinson: | Yes, sir. |
T.S. | So? What do you know about them? |
Hopkinson: | I’ve spoken to my man, Bella Singh, sir. He tells me they’re Sikhs from India, British subjects, and as such they do have a right of entry to Canada, sir. |
T.S. | The word is no entry. |
Hopkinson: | I realize that, but we may have a problem. |
T.S. | A what? |
Hopkinson: | Many are veterans of The British Army, sir: they’re sure to plead consideration for military service. |
T.S. | You can put it this way—we don’t mind them dying for us, we just don’t want them living with us. (laughing.) Get the point. |
Hopkinson: | (laughing) Yes sir… but if they should go to the courts– |
T.S. | They won’t go to the courts. He hasn’t done his homework. Have you forgotten our two orders-in-council? If an immigrant wishes to enter the country through a western port, he must make a continuous voyage from his own country. Have they done so? |
Hopkinson: | No sir, they haven’t. |
T.S. | And that’s no surprise. There’s not a steamship line in existence with a direct India-to-China route and for our second ace-in-the-hole – a tax, two hundred dollars per head, to be paid before entry. Do they have it? |
Hopkinson: | Bella Singh says they do not, however– |
T.S. | Again, not surprising. In the land of his birth, the average Indian’s wage is nine dollars per year. There—you see how we operate, Hopkinson? Never a mention of race, colour, or creed – and yet, we allow British subjects; we don’t allow them to enter. |
Hopkinson: | Thank you, sir; However, I must inform you that Herman Singh says– |
T.S. | Sh, sh. |
Hopkinson: | (lowering his voice) Hermann Singh says that the local Sikhs have raised the money for the head tax. |
T.S. | That’s not good. |
Hopkinson: | It’s possible that a launch– |
T.S. | It is possible? Do you pay for information like that? |
Hopkinson: | Bella Singh says a launch will deliver the head tax to those on ship late tonight. |
T.S. | The word is no entry, Hopkinson. |
Hopkinson: | Yes, sir! |
*Note: B. Singh was an active member of the Shore Committee members, an Indian community in British Columbia
May 6, 2014 – Timbre commémorant le Komagata Maru de Postes Canada
Credit: The Toronto Star
ACTION 4
Penser
Les voix de l’incident du Komagata Maru : Entrée refusée
Imaginez un navire arrimé au port de Vancouver lors des chauds mois de juin et de juillet. Les 376 passagers étaient prêts à débarquer; prêts à commencer une nouvelle vie au Canada et on leur a dit qu’on leur refusait l’entrée au pays. Ils ne pouvaient pas quitter le navire : pas de nourriture, pas d’eau, et aucune communication avec le monde extérieur. Leurs espoirs et leurs rêves de travailler au Canada, de commencer une nouvelle vie ici et de s’occuper de leurs êtres chers étaient anéantis.
De l’autre côté de la jetée, il y avait des représentants du gouvernement, des législateurs et des citoyens aux prises avec leurs propres problèmes. Est-ce que ces travailleurs allaient leur voler leur emploi? Est-ce que d’autres allaient suivre? Est-ce qu’ils étaient différents en raison de la couleur de leur peau? Allaient-ils changer leur mode de vie?
Pendant deux mois, la communauté sud-asiatique et certains membres de la communauté blanche ont fait pression dans les médias, auprès du public et auprès des tribunaux pour que l’on accorde le droit d’entrée aux passagers. Ils ont lutté contre le racisme ambiant, et contre les lois aux relents xénophobes adoptées pour garder les Asiatiques, les « Autres », à l’extérieur du pays.
Et la communauté à terre a lutté pour protéger ce que ses frontières lui garantissaient, selon elle. Les membres de la communauté luttaient pour leurs emplois et leur mode de vie.
Discuter
Discutez de ce qui suit :
- Selon vous, qui du gouvernement ou des immigrants avait l’argument le plus convaincant?
- Selon vous, comment les médias ont-ils traité l’événement?
- De quelle façon l’incident du Komagata Maru permet-il une meilleure compréhension des préjugés et de la discrimination?
- Des recherches indiquent comment la politique canadienne en matière d’immigration a évolué depuis 1914 et dressent la liste des changements qui peuvent empêcher la répétition d’un événement comme celui-là.
- Même si les lois ont changé, connaissez-vous des situations actuelles qui pourraient nous rappeler les citations et les points de vue ci-dessus?
ACTION 5
Discuter
Est-ce que des excuses sont suffisantes?
A. Avec un partenaire, discutez de la signification des excuses pour vous. Souvenez-vous d’une expérience importante où vous (ou une personne que vous connaissez) avez présenté ou reçu des excuses d’une personne, et partagez-la. Réfléchissez à ce qui suit :
- Comment vous êtes-vous senti après avoir présenté/reçu des excuses?
- Selon vous, est-ce que les excuses étaient sincères?
- Est-ce que les excuses ont changé votre relation avec cette personne?
- Que ce serait-il passé si vous n’aviez pas présenté d’excuses?
- Est-ce que vos excuses comportaient plus d’un mot?
B. Dans le cadre d’une discussion en classe, réfléchissez aux critères nécessaires à des excuses sincères. Vous pouvez partager vos histoires personnelles concernant les excuses.
Un pays présente ses excuses
En fonction des critères que vous avez établis pour des excuses personnelles, comment pouvez-vous appliquer ces critères à un pays qui présente des excuses à un groupe de personnes?
- En 2008, le gouvernement de la Colombie-Britannique a présenté une motion pour des excuses à l’Assemblée législative. Lisez la motion et discutez à savoir si ces excuses sont sincères et répondent à vos critères concernant les excuses. Selon vous, pourquoi a-t-il fallu autant de temps pour que les excuses soient présentées?
Débats de l’Assemblée législative
2008 Séance législative :
4e session, 38e Parlement, le vendredi 23 mai 2008
Gouvernement de la C.-B., motion No 62 – Motion d’excuses
Komagata Maru : Motion approuvée à l’unanimité
« Il est résolu que cette Assemblée législative présente ses excuses pour les événements du 23 mai 1914, alors que 376 passagers du Komagata Maru, amarré dans le port de Vancouver, se sont vus refuser le droit d’entrée au Canada. La Chambre regrette profondément que les passagers qui cherchaient refuge dans notre pays et notre province aient été renvoyés sans bénéficier d’un traitement juste et impartial comme c’est le cas dans une société où les personnes de toutes les cultures sont accueillies et acceptées. »
- Au mois d’août 2008, au parc Bear Creek Park de Surrey, en Colombie-Britannique, le premier ministre Stephen Harper a prononcé un discours devant 8 000 personnes lors d’un événement organisé par la communauté indo-canadienne, afin de présenter les excuses du gouvernement fédéral pour l’incident du Komagata Maru survenu en 1914.
- Tout de suite après le discours, des membres de la Société des descendants du Komagata Maru se sont rués sur le podium pour dénoncer les excuses.
- Pourquoi ont-ils réagi de cette façon?
- Qu’est-ce que le gouvernement canadien aurait pu ajouter à ses excuses?
En mai 2016 le premier ministre Justin Trudeau a donné des excuses officielles dans la Chambre des communes pour l’incident du Komagata Maru: « Aucune parole ne saura effacer la douleur et la souffrance qui les ont affligés. Malheureusement, le temps écoulé fait en sorte qu’aucun d’entre eux n’est avec nous aujourd’hui pour entendre nos excuses. »
http://pm.gc.ca/fra/nouvelles/2016/05/18/des-excuses-officielles-la-chambre-des-communes-lincident-du-komagata-maru
Les Sikhs canadiens sont devenus un grand force dans les politiques. Jagmeet Singh a été élu chef du Nouveau Parti démocratique (NPD) en octobre 2017.
http://quebec.huffingtonpost.ca/2017/10/01/jagmeet-singh-devient-le-nouveau-chef-du-npd_a_23229001/
ACTION 6
Penser
Des excuses ont été présentées à d’autres groupes victimes d’injustices en immigrant et en s’installant dans ce pays (p. ex., taxe d’entrée pour les Chinois, internement de Canadiens d’origine japonaise pendant la Deuxième Guerre mondiale, etc.).
- Est-ce qu’il y a encore des groupes victimes d’injustice lorsqu’ils immigrent ou s’installent au Canada?
- Comment nous ou le gouvernement, pouvons soutenir ces groupes?
Le Mémorial du Komagata Maru à Portal Park, Vancouver (Sally Gray)
Crédit photo : Sally E. Gray, Grayhound Information Services
Understandables: White Canada and The Komagata Maru, an illustrated history. (Une histoire illustrée) Édité par Ali Kazimi et publié par Douglas et McIntyre, 2012, cette publication récente documente l’incident à l’aide de photos d’archives, d’histoires personnelles et de références historiques concernant l’immigration de la communauté indo-canadienne.
http://bit.ly/komagatamaru
http://bit.ly/immigrationsikhe
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